Paper presented at the ICOM International Conference in Barcelona on 3 July 2001.

Louvain-la-Neuve : là où l'Université catholique de Louvain a créé une ville avec son musée

Bernard Van den Driessche
Administrateur du Musée de Louvain-la-Neuve


L'Université catholique de Louvain a 575 ans

Fondée en 1425, l'Université catholique de Louvain fête depuis l'année dernière son 575e anniversaire. La longue histoire de l'Université est célébrée actuellement dans des expositions promenades regroupées sous le titre "Aller-Retour. Kennis maken. Town and gown" qui se tiennent à la fois dans la ville de Louvain(Leuven) et celle de Louvain-la-Neuve. Car il faut le rappeler ici, très brièvement, le dernier grand événement qui a marqué l'histoire de notre Université est celui de sa division, en deux entités séparées, pour des raisons linguistiques et politiques propres à notre pays.

En 1970 en effet, une loi accorde la personnalité civile à deux universités distinctes, l'une flamande qui reste à Leuven, l'autre francophone, qui émigre en Wallonie à une trentaine de kilomètres au sud-est de Bruxelles, sur une terre de près de 1 000 hectares . L'Université catholique de Louvain y crée une ville nouvelle, avec pour nom Louvain-la-Neuve, toujours en expansion aujourd'hui. Pour des raisons de stratégie propre à ses fonctions la Faculté de médecine sera cependant implantée à Bruxelles.

L'Université catholique de Louvain représente actuellement une large communauté internationale : 20 000 étudiants de plus de 100 nationalités différentes, un staff de 5 000 enseignants, chercheurs et collaborateurs, 200 unités de recherche, 150 000 anciens dans le monde entier. C'est une université complète, qui forme près d'un universitaire sur deux dans toutes les disciplines en Belgique francophone.

L'histoire commune de l'Université et dans sa phase plus récente celle qui, va de 1835 (soit cinq ans après la constitution de l'Etat belge) jusqu'aux années 1960 témoigne, comme dans d'autres institutions européennes, de la multiplication de création de collections destinées à soutenir presque toutes les disciplines enseignées.

Une longue notice non signée parue dans l'annuaire de l'Université de 1851 a fait le point sur "les collections scientifiques de l'Université de 1835 à 1850" et permet d'avoir une vision de la situation à ce moment.i Par ailleurs les mêmes annuaires de l'Université permettent de mettre en exergue la diversité des ensembles qui sont au moins répertoriés pendant un peu plus d'un siècle par la mention de leur localisation dans un bâtiment académique. On est surpris de découvrir ainsi que plus d'une quarantaine d'ensembles repris sous le vocable de "Cabinet", "Collection" ou "Musée" ont existé. La dernière appellation qui est encore celle qui prévaut dans de nombreuses universités de par le monde ne correspond pas nécessairement à la notion actuelle de musée et certainement pas à celle numériquement plus réduite encore de musées ou collections universitaires régulièrement accessibles au public.

La plupart des ces collections ont soit connu des développements importants mais limités dans le temps (c'est par exemple le cas du musée de Zoologie ou de celui du musée Houiller), ont soit survécu mais sans avoir pu se développer pour constituer de véritables "Musées" ou enfin ont tout simplement disparu. Seules les collections d'art et d'archéologie font exception et sont à l'origine du musée actuel dont le développement continue encore aujourd'hui avec le projet d'un nouveau bâtiment qui sera érigé sur la place principale de la nouvelle ville.ii

Des collections de moulages et d'originaux.

Sans vouloir entrer dans tous les détails de l'histoire des collections qui ont été à l'origine de la création du musée sous sa forme actuelle, il convient d'en évoquer ici brièvement les grandes étapes. Un musée n'est-il pas d'abord constitué en effet d'un patrimoine ?

L'origine des collections remonte à un ensemble de moulages et de photographies qui avait été rassemblés dès 1864 au lendemain de la Conférence des catholiques et d'une grande exposition consacrée au patrimoine religieux belge présentée à Malines. Une riche collection de moulage d'œuvres antiques, médiévales et de la renaissance fut offerte par le gouvernement grec, à titre d'aide à la reconstruction du patrimoine détruit pendant la première guerre mondiale et par l'Allemagne dans le cadre du Traité de Versailles.

De nombreuses œuvres originales furent également acquises au cours du temps, le plus souvent grâce aux professeurs de l'université: un cercueil égyptien, des objets du Proche-Orient, pour un "Musée biblique", des antiquités grecques, étrusques, romaines (Fonds Fernand Mayence), quelques sculptures anciennes et fragments d'architecture… D'abord installées dans les Halles universitaires de Leuven, elles furent ensuite aménagées sans être accessible au public, dans les bâtiments de l'Institut supérieur d'archéologie et d'histoire de l'art où elles étaient utilisées pour certains cours.

A la fin des années 1960, une succession de legs et donations enrichira ce patrimoine commun iii dont une partie a été partagé lors de la scission de l'Université déjà évoquée.

Le legs historiquement le plus important remonte à 1966 lorsque Frans Van Hamme faisait don à l'Université de sa collection de sculptures, peintures, mobilier et arts décoratif du XIVe au XIXe siècle. Selon le testament, ce legs impliquait la création d'un musée spécialement destiné à la formation en histoire de l'art et archéologie "accessible au public et surtout aux étudiants…". Il coïncidait avec la séparation en deux sections de l'Université catholique.

En 1975 ce sera la donation de 53 vases antiques (Grèce, Italie méridionale) par l'Abbé Adolphe Mignot.

En 1986 Serge Goyens de Heusch, collectionneur et ancien directeur d'une galerie bruxelloise offre au musée 60 œuvres d'artistes belges du XXe s. A sa suite, de nombreuses autres donations d'artistes ont enrichi les collections d'art moderne.

En 1990, au moment où de grands projets s'élaborent pour la construction d'un nouveau bâtiment, le musée hérite du legs de Charles Delsemme qui compte un ensemble important d'œuvres appartenant à différentes époques et cultures.

En 1994 Eugène Rouir offre près de 1500 gravures couvrant l'histoire de cette technique des origines à aujourd'hui, avec des noms célèbres comme ceux de Dürer, Callot, Rembrandt, Canaletto, Goya, Picasso, etc. Cet ensemble constitue à présent notre Cabinet des estampes.

En 1997 c'est la donation Noubar et Micheline Boyadjian qui entre dans notre patrimoine avec de nombreux objets d'art et de piété populaires, des tableaux de peinture naïve ainsi que trente-huit œuvres de Micheline Boyadjian

Très prochainement enfin sera finalisée la donation de la Fondation Serge Goyens de Heusch pour l'art belge contemporain, comptant près de 1500 œuvres (peintures et estampes) d'artistes belges. L'inauguration de cette Fondation avait déjà eu lieu dans les salles du musée en 1983, à l'occasion d'une exposition temporaire consacrée à septante artistes belges.

Ctous ces dons élargissaient notre patrimoine à l'art moderne et contemporain belge, à l'esprit du "Musée imaginaire" de Malraux dans son regard sur les cultures du monde, à l'histoire de l'art de la gravure, et aux arts dits "naïfs" et "populaires".

L'ensemble des collections anciennes et celles acquises depuis l'inauguration du musée actuel illustrent une dynamique étroitement lié à l'aventure de la création de la nouvelle ville.

Louvain-la-Neuve : une nouvelle ville

La ville de Louvain-la-Neuve a été créée par l'Université catholique de Louvain au moment de sa scission déjà évoquée. Sur des terrains agricoles dépendant de la commune administrative d'Ottignies, s'est développé depuis 30 ans un réel projet urbanistique à la fois homogène et surprenant.

Depuis la création de Charleroi en 1666, Louvain-la-Neuve est en effet la première ville neuve conçue en Belgique. Concept des architectes J.-P. Blondel et R. Lemaire, la première pierre en a été posée le 2 février 1971 par le roi Baudouin Ier. Le choix délibéré d'une ville à taille humaine dont la matrice est l'université, la juxtaposition et l'intégration des bâtiments académiques dans un tissu urbain organisé sur une circulation piétonne, la circulation automobile et les aires de stationnement étant relégués sous une dalle, la place réservée aux espaces verts et à un lac constituent autant d'élements caractéristiques de la jeune agglomération.

La multiplication d'infrastructures socio-culturelles (un théâtre, l'aula magna avec une salle de spectacle de 1300 places, un centre culturel, un centre musical, le récent complexe de 13 salles de cinéma, le musée…) de loisirs, d'équipements sportifs et le développement d'un parc scientifique orienté vers la haute technologie sont autant d'atouts pour un avenir ancré dans un riche passé.

La ville compte actuellement environ 25.000 habitants dont 14.000 sont étudiants et marquent encore fortement le rythme de la vie selon le calendrier académique des périodes de cours et des vacances.iv

Le transfert des facultés et services de l'Université s'est échelonné sur sept d'années. De 1972 à 1979, neuf facultés ont ainsi déménagé progressivement de Leuven à Louvain-la-Neuve; la Faculté de médecine élira domicile à Bruxelles. Je vous laisse imaginer ce qu'a pu représenter un tel transfert d'équipement, de bibliothèques, de laboratoires, de collections…. sans qu'un seul jour de cours ne soit jamais suspendu ! La Faculté de Philosophie et Lettres a été la dernière à rejoindre le nouveau site universitaire. C'est à l'occasion de son inauguration que fut ouvert le musée qui occupe 1.000m2 du rez-de-chaussée de son bâtiment, le Collège Erasme. Musée à vocation autant académique qu'urbaine. Il constitue à cet égard le premier exemple de ce type en Belgique.

Le musée actuel est un objet marqué, comme sa ville, par les transformations de la société et de l'Université subies ou promues à partir des années '60. Rappelons que le mouvement de "mai 68" avait dénoncé un enfermement de la culture, dont les musées étaient considérés comme des témoins particulièrement représentatif.

On rêvait d'un musée ouvert à la rue, et inspiré à la fois par la modernité et par la liberté d'un regard personnel, critique et conscient des stéréotypes véhiculés par l'architecture, les modes de présentation et les discours éducatifs.

Lors de son ouverture et malgré sa localisation le dialogue avec la ville était particulièrement prometteur dans la mesure où celle-ci se présentait comme un projet où la tradition devait s'inscrire dans une dynamique créatrice. L'idée de briser le "ghetto universitaire" devait cependant, pour le musée, s'accompagner d'une installation dans un bâtiment à fonctions académiques ce qui a d'ailleurs marqué les limites de sa croissance.v

Universitaire et public

Un nouveau Musée pour une ville nouvelle et une université en renouveau!", c'est en ces termes que le Directeur du musée, Mr I. Vandevivere, synthétisait le projet du nouveau musée lors de son inauguration officielle.

De par sa situation actuelle le musée est inscrit dans la vie quotidienne des étudiants, des enseignants et des habitants de la ville nouvelle. Son originalité tient précisément à la combinaison des fonctions académiques et urbaines qu’il harmonise depuis sa création.

Conserver, étudier et exposer un patrimoine; inscrire ces fonctions traditionnelles du musée dans la formation universitaire et prolonger ces objectifs par une fonction d’animation socioculturelle voilà la fonction de ce musée depuis plus de vingt ans.

Si de 1979 à 1999 plus de 160 expositions temporaires ont été organisées, elles l'étaient pour créer un public plus large et pour participer à une dynamique culturelle dans la ville nouvelle, sa région et le pays. Avec le Théâtre Jean Vilar, la Médiathèque de la Communauté Française, l'asbl MUSIQUE-Louvain-la-Neuve et les diverses associations organisatrices de concerts, le Centre Culturel d'Ottignies, les nombreux cycles de conférences, le Musée a manifesté en effet sa volonté de participer et de générer un espace culturel permanent (par ses collections) et temporaire (par ses expositions). L'exiguïté des espaces et la volonté de générer une dynamique d'exposition nous a conduit dès le début à ne pas cloisonner de manière rigide le patrimoine permanent ( à l'origine essentiellement de l'art ancien) des expositions temporaires (le plus souvent réservées à des artistes contemporains).vi Plusieurs expositions ont eu pour thème, la ville au sens large, l'art dans la ville, l'urbanisme, pour marquer la réalité de notre institution dans le processus de création de cette ville nouvelle.

Par ailleurs, le service éducatif privilégie l'accueil des groupes scolaires et d'adultes en dehors de la communauté universitaire, le service informatique développe depuis plus de 10 ans des bornes multimédias interactives pour le visiteur isolé et prépare actuellement un programme de bornes individuelles portables pour la visite individuelle, l'atelier de conservation et de restauration répond également à des demandes extérieures. Tous ces services ont inscrit, au fil des ans, le musée dans le projet de cette ville en développement et avec plus de difficulté dans la structure de l'université comme il sera expliqué plus en détail au moment d'évoquer ce point.

La localisation actuelle au rez-de-chaussée d'un bâtiment académique et l'absence d'identification architecturale d'un bâtiment autonome constituent cependant encore un obstacle pour bon nombre de visiteurs qui assimilent cet espace à un lieu réservé à la seule communauté universitaire malgré la dynamique de nos activités Quant aux étudiants régulièrement sollicités par des programmes attractifs d'expositions temporaires, ils restent trop nombreux encore à n'avoir pas mis à profit leurs années d'études pour découvrir la richesse et la diversité des collections permanentes.

Et pourtant l'option d'ouverture et de rencontre des différentes formes d'art dans une présentation mettant en évidence le dialogue a participé très tôt à l'originalité de notre démarche, bien avant ce qui devient déjà une mode aujourd'hui. Il est vrai que l'exiguïté de nos espaces (1.000m2 au total) nous avait amené à ouvrir des espaces de rencontres entre nos collections permanentes et des expositions temporaires d'artistes contemporains, entre l'approche technologique des arts et les œuvres présentes dans nos collections…vii

Maître-mot : dialogue

L'aventure de notre musée est autant le fruit des circonstances que d'un plan délibéré. Celui-ci se base sur deux principes muséologiques évidents mais néanmoins essentiels.

Le musée est d'abord un espace physique de perception, d'interprétation et de délectation de l'objet. Cet objet y est valorisé dans sa nature et sa présence matérielle par la lumière autant que par sa disposition spatiale.

Le musée est ensuite un lieu public. Le visiteur y est déterminant pour la dynamique de l'institution; sans public il n'y a pas de musée. L'énergie qu'il apporte répond à celle de l'institution pour créer un forum. La réalité du Musée-forum (certains visiteurs ont parlé chez nous de parc-public) est favorisée par la structure piétonne ainsi que par la densité et la diversification des constructions de Louvain-la-Neuve, tandis qu'à son tour le musée joue un rôle urbanistique certain en particulier au niveau d'une identification culturelle et d'une polarisation du centre ville.

De la conjonction de ces deux principes, on induit tout naturellement une politique de présentation des collections et un accueil du public ainsi qu'un rapport avec d'autres institutions qui se fondent sur le dialogue.

Ce dialogue construit sur le triangle visiteur/objet/institution se prolonge en outre dans notre musée de manière privilégiée depuis 1985 avec l'association des Amis du musée et ses bénévoles. Avec les Amis ce dialogue a suscité de nombreux donateurs. C'est d'ailleurs cette économie du don , selon les termes de I. Vandevivere, qui préside à l'accroissement de notre patrimoine en particulier depuis les dix dernières années, comme évoqué précédemment dans la description de nos collections.

Enfin le dialogue se manifeste encore dans l'interaction entre permanence et mobilité (patrimoine et expositions temporaires), entre présent et passé (tellement important dans une ville nouvelle encore en création et cherchant ses repères), entre l'instant (vision fugitive - notre bulletin bimestriel s'intitule le Courrier du passant) et la durée (au musée, on y vient et l’on y revient).

Une structure au sein de l'Université

Tout ceci ne doit cependant pas faire oublier la position particulière d'une "entité" telle qu'un musée au sein de l'Université qui est une institution traditionnellement bien hiérarchisée et plus encore dans une période plus récente de son histoire très structurée administrativement.

Celle de notre musée est particulièrement exemplative à cet égard.

Au moment de sa création, le musée actuel avait à peine le statut d'une unité inscrite dans l'organigramme du Département d'archéologie et d'histoire de l'art, qui est lui-même une composante de la Faculté de Philosophie et Lettres. Les gestionnaires de la première heure n'avaient pas de mandat officiel, mais étaient considérés comme appartenant à une structure provisoire, non définie, et qui fut maintenue pendant plusieurs années. Le développement des activités du musée, sa place au sein de l'université, de la ville et de la société, ses relations avec le Département d'archéologie et la Faculté de Philosophie et Lettres ont amené les autorités de l'université à en modifier le statut. Dans un premier temps (1994) le Conseil d'administration de l'université a défini la place du Musée dans la structure de l'UCL. Le 29 mars 1995, il décide "de localiser le Musée en logistique scientifique et de le doter d'une structure de gestion particulière". Cela signifie, en ce qui concerne son statut : "que le Musée devient une entité autonome par rapport à la Faculté de philosophie et ou au Département d'archéologie et d'histoire de l'art; que n'étant pas un département; le Musée a des activités de recherche et d'enseignement qui doivent être menées en étroite concertation avec les départements concernés et en particulier avec le Département d'archéologie et d'histoire de l'art".

En ce qui concerne ses missions il est précisé que : le Musée est un outil au service d'activités académiques d'enseignement et de recherche; le Musée joue un rôle urbain d'animation de la vie culturelle.

En application de ces décisions, les autorités de l'université ont récemment défini une structure de gestion du musée et ont créé en 1998 un Conseil de gestion sur base de propositions formulées par la direction actuelle du musée. Ce Conseil a pour mission :

veiller au bon exercice de la fonction éducative et culturelle du Musée, dans sa commune, sa province, sa région et sa communauté;
arrêter la politique en matière d'acquisition, politique qui lui est proposée par la direction du Musée;
contribuer à la recherche des moyens financiers;
arrêter la politique en matière de personnel, politique qui lui est proposée par la direction du Musée.

La composition de ce Conseil de gestion, également proposée par la direction du Musée, reflète la volonté d'ouverture de la structure de gestion à un partenariat plus large. On y trouve ainsi, outre des membres appartenant à l'institution universitaire - l'administrateur général, le pro-recteur en Sciences humaines, deux autres membres désignés par le Conseil d'administration de l'université, le Directeur et l'administrateur du musée -, des représentants des secteurs particulièrement importants pour la dynamique du musée dans sa dimension culturelle et sociale à savoir : le Président des Amis du Musée, un représentant de la Ville d'Ottignies-Louvain-la-Neuve , un représentant de la Province du Brabant wallon, un représentant de la Région Wallonne (pour les compétences en matière de tourisme) et de la Communauté française Wallonie-Bruxelles (pour les compétences en matière de musées).

Ce nouvel organe, s'il n'a pas encore à ce jour pu être réellement opérationnel, ne manquera certainement pas de devoir faire ses preuve pour le projet qui se dessine à l'horizon 2003 et par lequel je voudrais terminer.

Le musée à l'horizon 2003

Le premier projet d'agrandissement du musée a été présenté aux autorités, par les Amis du musée en juin 1989.

Le terrain prévu, considéré à l'époque comme le seul possible pour une extension rationnelle au départ des espaces existants, était celui situé à flanc de talus en contrebas de l'église Saint-François d'Assise. Le bâtiment ainsi construit aurait été mis en liaison avec le musée actuel, via un passage souterrain, et permettait d'avoir une vue sur le lac. La notion de visibilité du lac au départ du musée pour mieux affirmer sa fonction de loisir a été un leitmotiv tout au long des projets d'agrandissement. L'architecte Jean Cosse en avait esquissé un premier schéma.

Très rapidement ce projet a pris une ampleur inattendue dans le contexte du festival Europalia Japon en automne 1989. Une autre proposition appelée alors "projet post-Europalia Japon" a été remise aux autorités de l'Université. L'architecte Kisho Kurokawa fut contacté et tomba littéralement sous le charme du projet urbain de Louvain-la-Neuve et de l'idée de se voir confier la réalisation du "Musée du dialogue". Visitant le site le 11 septembre 1990 il releva le défi de présenter gracieusement un premier projet L'avant-projet était à ce point déjà abouti qu'il fut considéré par beaucoup comme un projet définitif et il fit véritablement l'effet d'une bombe dans le milieu néo-louvaniste. Le bâtiment articulé en plusieurs espaces en partie disposés sur la surface du lac illustrait le principe de la symbiose prôné par Kisho Kurosawa dans d'autres projets architecturaux y compris de musées ix

Pour répondre à une série de contraintes urbanistiques, qui n'avaient pas été formulées avec précision au départ, l'architecte adapta son premier avant-projet et en présenta en 1992 une seconde version. Pour toute une série de raisons, politiques, économiques, relationnelles… ce projet qui avait suscité autant d'enthousiasme que de réactions parfois négatives (il ne laissait donc personne indifférent) n'a pas pu être réalisé. Il a cependant eu plusieurs effets importants pour notre institution et pour le développement urbain.

Ce projet a tout d'abord relancé la réflexion urbanistique pour l'achèvement du centre urbain, à savoir la fermeture de la Grand-Place et sa mise en relation avec le lac. Le grand geste architectural et urbain du premier avant-projet de K. Kurokawa a en effet marqué les projets en cours d'élaboration actuellement.

Dans le cadre, d'une part de l'achèvement de la Grand-Place et d'autre part du redéploiement des surfaces affectées à la Faculté de Philosophie et Lettre, un nouveau projet architectural est en cours d’élaboration et devra être achevé en 2003. Le bureau d'architecture Philippe Samyn & Partners a été chargé de concevoir les plans de la Grande Aula (grand auditorium polyvalent de 1300 places) et ceux du musée qui avec le complexe des cinémas inscrit dans le projet "Esplanade" achèveront le cœur de Louvain-la-Neuve.

Chacun des deux éléments qui composent l'immeuble du musée (l’un en forme de triangle, l'autre en forme de "botte") comportera quatre niveaux, dont un en sous-sol. Avec un total de 4.000m2, la surface sera quatre fois celle qui est disponible aujourd'hui, tant pour les collections permanentes, que pour les espaces d'expositions temporaires, les locaux de services et les réserves. Le passage qui mènera le promeneur de la Grand-Place à la place Raymond Lemaire devant la Grande Aula lui permettra de découvrir, par de hautes et larges baies vitrée, l'intérieur de l'édifice et une partie de ses collections.x

Ainsi le nouveau Musée, par son architecture et par sa situation, participera plus encore à la dynamique culturelle du site de Louvain-la-Neuve et il sera une vitrine particulièrement importante de l'Université catholique de Louvain au cœur de la ville qu'elle a créée il y a 30 ans aujourd'hui.


i "Notice sur les collections scientifiques de l'Université de 1835 à 1850", Annuaire de l'Université catholique de Louvain, 1851, pp. 237-288.

ii Bernard VAN DEN DRIESSCHE, "Les musées de l'Université" in Leuven / Louvain-la-Neuve. Aller Retour, sous la direction de J. ROEGIERS et I. VANDEVIVERE, (P.U.L.), Leuven, 2001, pp.131 - 140. Bernard VAN DEN DRIESSCHE, "University and universality in Belgium", Museum international, n°207/3 july-september 2000, pp.38 - 44.

iii Bernard VAN DEN DRIESSCHE, "Histoire des collections", Courrier du passant, n°51 (avril-mai1997), pp.4-16.

iv Jean-Marie LECHAT, Louvain-la-Neuve. Trente années d'histoires. (Edit. Academia Bruylant), Louvain-la-Neuve, 2001

v Ignace VANDEVIVERE et Bernard VAN DEN DRIESSCHE, Le musée de Louvain-la-Neuve : de l'université à la cité", in Les musées en mouvement. Nouvelles conceptions, nouveaux publics (Belgique,Canada) (Bruxelles : ULB Ce,tre d'Etudes Canadiennes,2000), pp.73-80.

vi Ignace VANDEVIVERE, "Visite au musée de Louvain-la-Neuve", Académie royale de Belgique. Bulletin de la Classe des Beaux-Arts, 5e série, tome LXII, n°s 4-9 (1980), pp. 78-83. Ignace VANDEVIVERE, "Le musée de Louvain-la-Neuve", Vie des musées, vol.2(1979), pp.22-30. Voir en outre le Courrier du passant. Bulletin du musée et des amis du musée de Louvain-la-Neuve, n°10, 1989, 152 pages (10 ans du musée) et n°64-65 novembre-décembre 1999, 108 pages (Le musée a 20 ans). Voir encore le site web du musée régulièrement actualisé à l’adresse: http://www.muse.ucl.ac.be.

vii Ignace VANDEVIVERE, "Musée erratique", Courrier du passant, n°45 (février-mars 1996), pp.2-6.

viii Ignace VANDEVIVERE, "Le musée de Louvain-la-Neuve : un dialogue entre l'Université et la cité" in Leuven / Louvain-la-Neuve. Aller Retour, sous la direction de J. ROEGIERS et I. VANDEVIVERE, (P.U.L.), Leuven, 2001, pp. 141 - 144.

ix Kisho KUROKAWA, Architecture de la symbiose 1979-1987, Milan-Paris, Monographies d’architecture-Electa Moniteur,1987. Voir le Courrier du passant, n°18 (mai-juin 1991), pp. 6 - 44

x Voir le Courrier du passant, n°18 (mai-juin 1991), pp. 6 - 44.


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